ANTARCTIQUE
"Ces immensités drapées dans un suaire blanc..."
(Hermann Melville ; Moby Dick)
Vers la forteresse blanche
Naviguer dans les parages antarctiques c'est prendre la mesure de la démesure. C'est risquer le vertige, l'absence, le vide et l'émerveillement. Vers la forteresse blanche compose un boat-movie polaire et nous entraîne de l'autre côté du miroir. Vers un monde étrange, implacable et enchanteur. Une scène gelée où la vie et la mort s'échangent leurs répliques. Un outre-monde où les sirènes de l'Inconnu chantent jusqu'à en faire vibrer nos propres murailles...
Paysage sonore (40') réalisé avec le soutien de la Fondation Polaire Internationale, de la SCAM, de la RTBF et de la SACD. Diffusion "Ouïe Dire" Pascale Tison La RTBF. et Radio Campus Bruxelles.
Par-delà les banquises
Mettre le cap vers ces mers engourdies de froid, c'est participer de cette géographie sacrée. De cette géographie des merveilles, celle-là même qui forge les mythes et cristallise les espérances. Les banquises révèlent un champ de bataille aux proportions d'éternité où s'affrontent les éléments dans des combats acharnés. Peu importe l'issue, vainqueurs et vaincus dérivent vers le même néant. Seule demeure, cette scène gelée où la vie et la mort s'échangent leurs répliques. L'enfer et le paradis réunis qui, par la grâce du vent et de la lumière, se métamorphosent en l'un ou en l'autre. Comme une allégorie géographique de l'homme à travers son destin.
Réalisé avec le soutien de la SCAM France et de la Fondation Polaire Internationale. Diffusion en ouverture du Festival "Etonnants Voyageurs" à Saint-Malo. Diffusion au Festival International du court-métrage de Lucania (Italie) et au Festival Polaire de Pleneuf Val André. (Activer le son sur la barre du lecteur vidéo).
"A chaque effondrement des preuves, le poète répond par une salve d'avenir » (René Char)
S'il est bien un être pour qui ces vers résonnaient particulièrement, c'est Ernest Shackleton. L'une des plus grandes et plus attachantes figures de l'histoire polaire Antarctique. A bord de son navire "L'Endurance", au nom particulièrement prémonitoire, il se lança en 1918, à l'assaut du Pôle Sud. Mais son navire bloqué par une épaisse banquise fut, après une lente agonie, broyé par les glaces. La banquise dérivante, parcourue de failles océanes allaient devenir leur maison pendant près de dix-huit mois. Pour sauver ses hommes, Shackleton se lança avec quelques hommes à bord d'une simple chaloupe, à l'assaut du redoutable océan Austral. Affrontant de véritables murs d'écume, disposant trop rarement de la ligne d'horizon pour faire le point exact, il parvint pourtant à destination : l'île de Géorgie du Sud. Mais la violente tempête qui faisait rage les fit accoster du mauvais côté de l'île. Pour rejoindre la communauté de baleiniers, ils leur fallait encore escalader les hautes montagnes dans lesquelles nul ne s'était jamais aventuré. Au terme d'une marche hallucinée, à bout de forces, transis de froid, ils rejoignirent la communauté des hommes. De là, il put lancer les opérations de secours. De cette odyssée sauvage, il ramena tout ses hommes vivants ! Jamais, il n'atteindra le Pôle Sud... Amoureux des poètes et de l'aventure, Ernest Shackleton est entré dans la légende des pôles comme un homme doté d'une force morale et d'une endurance exceptionnelles, plaçant la vie de ses compagnons avant les honneurs et la gloire... Son livre "L'odyssée de l'Endurance" retrace précisément et sobrement son aventure. Un récit fort préfacé par Paul Emile Victor qui voyait en lui "une âme de haute volée" et qui lui rend cet hommage : "Telle est la vertu première de l'aventurier digne de ce beau nom : faire que l'aventure soi déjà en elle-même, par-delà les aléas du meilleur et du pire, du succès et de l'échec, un accomplissement. A quoi réussit ici, mieux qu'aucun autre que je sache, Shackleton le Grand !"